Introduction

Nous cheminons de 1989 à ce jour, vers la construction d’un droit et des institutions africaines de prise en charge de l’Enfant.

Il se met progressivement donc à jour, des évolutions vers un droit spécial de l’enfance, et surtout une justice des mineurs

En effet au niveau du cadre national des Etats, 1989 marque une date historique, avec l’avènement de la CIDE, qui institue l’exigence d’un droit spécial de l’enfant, mettant en mouvement le processus d’adoption de  lois ou de codes de l’enfant, compilation centralisée des textes configurant le cadre légal nécessaire.

Toutefois dans la dynamique de cette construction du dispositif légal, institutionnel de prise en charge et d’assistance de l'enfant, il est à constater une lenteur dans l’édification d’organes structurants ou qui restent attente, et même pour ce qui en existe, il y a une absence dans  la mouture actuelle, d'un format adapté. les structures créees ou à créer sont encore inadaptées motivant la nécessité d'une recherche sur le modèle à inventer et mettre en place.

A l’échelon régional aussi:

Après l'adoption de la charte africaine des droits et du bien être de l'Enfant, il y a encore le constat de lenteurs dans le processus de réflexion et d’action pour sa contextualisation, le chantier restant principalement au stade des recommandations.

Au regard donc de tout ce processus en cours une revue est à faire sur des questions urgentes dont la solution nous interpelle.

Partant de là, pour concrètement faire des droits de l'Enfant une réalité en Afrique l''urgence appellera à travailler pour garantir par tous une mise en oeuvre des principes fondamentaux de la CIDE en tout ce qui concerne l'enfant à savoir: respect de l'intérêt supérieur, assurance du droit au développement, à la participation, rejet de toute discrimination.

Cela ne peut être orienté et animé que par une réelle politique de protection sociale de l'enfant à installer et promouvoir sur la base d'un système d'intervention que les Etats doivent organiser.

En définissant le cadre de ce système de protection sociale il sera alors possible d'en déterminer les objectifs à atteindre, les résultats attendus, les moyens de contrôle et d'évaluation. Cela facilitera ensuite les analyses de son fonctionnement, avec l'identification de ses limites et des correctifs  à y apporter.

Car depuis 1989, la plupart des actions menées s'est bâti sur un dispositif d'alerte/réaction, qui n'a pu avoir que l'effet de conduire des politiques et actions sectorielles diverses mais limitées, généralement sans vision globale ou coordination d'ensemble.

Il est nécessaire de bâtir maintenant une synergie d'intervention, qui ne peut être portée que par la mise en place dans les différents états de l'objectif défini de construction d'un  système de protection sociale de l'enfance.

Mais dans cette voie il y a des points d'urgence à ne pas négliger comme l'identification des bénéficiaires, point d'action prioritaire dont le réglement repose sur la solution de la question de l'état civil. 

La minorité de l'enfant et la gestion inadéquate du service de l'état civil en Afrique

 

LA DETERMINATION DE L’AGE DU JUSTICIABLE MINEUR ET SES CONSEQUENCES JURIDIQUES

  • L’âge de la minorité  et ses aspects juridiques:

DEFINITION DE L’ENFANT SELON LA CIDE : Toute personne humaine âgée de moins de 18 ans, sauf si la législation nationale en décide autrement.

CET ENFANT est aussi appelé MINEUR, en opposition à l’adulte considéré comme MAJEUR.

La minorité se définit comme le statut juridique de l’enfant. Plus classiquement on dira que c’est l’état des individus qui en raison de leur jeunesse, sont présumés n’avoir ni la volonté, ni le développement intellectuel suffisant pour participer au commerce juridique.

Cette minorité dès qu’elle est juridiquement constatée doit entrainer une prise en charge particulière, se traduisant par des garanties juridiques conférées.

Et c’est pourquoi la détermination de l’âge devient une question majeure et centrale dans la prise en charge judiciaire de l’enfant. Car l’âge est le critère permettant de déterminer la minorité, et ainsi justifier la reconnaissance des droits conférés au mineur.

Il devient dès lors essentiel pour chaque acteur saisi, de s’interroger sur l’existence de l’âge requis justifiant l’accès aux droits de la minorité.

Et l’existence avérée de cette minorité entraine une diversité de conséquences légales. 

Ainsi selon la diversité des matières juridiques, cette minorité est un critère d’appréciation de l'incapacité juridique de l’enfant.

C’est ainsi qu’en droit pénal cette minorité constatée confère d’abord un privilège de juridiction, et une prise en charge procédurale spécifique. Et le critère permettant la reconnaissance de ce privilège sera donc aussi fondé sur la détermination de l’âge du justiciable mineur.

En droit civil la minorité sera aussi cause d’incapacité juridique, le mineur ne pouvant avoir l’exercice de ses droits même si la jouissance ne lui en est pas contestée. L’exception admettant cependant certaines capacités particulières. Mail il est toutefois conféré des statuts de représentation juridique à des personnes bien définies pour garantir l’exercice des droits pour le mineur.

Ainsi selon que l’on soit devant le juge civil ou pénal, la détermination de l’âge est une question fondamentale de droit à trancher, et si la minorité est avérée il en résultera une prise en charge juridique et judiciaire particulière à organiser pour le mineur.

Toutefois si la détermination de l’âge a une importance, l’application de la règle en pratique rencontre beaucoup de difficultés, surtout si l’enfant ou le parent ne sont à même de prouver l’âge du justiciable.Tel est le cas si la preuve usuelle à cet effet n'est pas disponible à savoir les actes d'état civil de l'enfant.

Ainsi le juge est alors en devoir de trancher la question de l’âge, mais le moyen de la preuve fait défaut. Et en voie palliative on s’appuie sur des présomptions, sujettes à des décisions de faible sécurité juridique pour l’enfant.

Dans des pays il est arrivé même que des acteurs soient amenés à estimer l'âge par des procédés non orthodoxes: observation physique, palpation d'organes...

Et pire alors lorsque le peu de souci accordé à la recherche de l'âge, a privé à des enfants le bénéfice des droits résultant de la minorité, surtout faute d'assistance appropriée pour pouvoir contester ces décisions de l'autorité. 

Pour contrer ces difficultés des recommandations palliatives sont faites pour un recours à l'expertise médicale. Mais que faire en l'absence du personnel médical à plus de 100 km à la ronde, et en plus face à une autorité peu motivée et non formée au devoir de respect des droits de l'enfant.

D'ou l'urgence face à de telles situations, de devoir s'interroger sur la question de la gestion de l'état civil en Afrique.

Car l'application des droits de l'enfant implique en effet la reconnaissance de l'âge de la minorité, d'où la nécessité de la preuve de cet âge, et l'exigence alors de l'acte d'état civil comme preuve est un impératif.

  • La question de l'état civil en Afrique

La CIDE exige en effet la garantie à l'enfant par l'Etat de son statut juridique, son état civil, à savoir son droit au nom, au domicile, à la nationalité, à la protection de son identité. Le service de l'état civil lui garantit donc à titre de preuve les éléments documentaires nécessaires de son identification juridique pour sa participation à la vie sociale et au commerce juridique.

La mise en oeuvre de cette garantie dépendra d'une bonne gestion préalable de cette procédure d'identification par ce service de l'état civil, or cela est loin d'être le cas présentement en Afrique.

Le constat aujourd'hui est qu'il y a une gestion minimaliste de ce service: par une sous déclaration des naissances, des décès, des mariages; et la structure en charge du fonctionnement du service ne dispose pas de la logistique adéquate au plan matériel et humain, pour preuve les regitres sont tenus dans un état précaire, et encore s'ils sont établis, ensuite sont conservés dans des locaux inadaptés subissant les intempéries, l'humidité; enfin la fiabilité des actes produits est problématique relativement aux mentions portées souvent dans des formulaires non standardisées, en plus incomplètes ou non reportées (mentions marginales),enfin avec une délivrance hasardeuse favorisant des fraudes.

Cette situation déplorable a une explication imputable tant aux populations qu'à l'Etat.

Par rapport aux populations, il est notable que la perception culturelle de l'état civil est qu'elle n'est pas rentrée dans les moeurs; les populations manifestant généralement une défiance à son égard, y voyant la forme d'une intrusion inexpliquée de l'Etat dans vie quotidienne.

En effet la société traditionneelle dispose de ses propres moyens d'identification (pour savoir qui est qui, son appartenance familiale, sa filiation etc...), et ne trouvait aucun intérêt à recourir à ce système dont la finalité ne lui était pas démontrée; et qui de plus institué par l'autorité coloniale, lui donnait de sérieux motifs de réprobation, du fait des pratiques que ce service facilitait à la dite autorité, au plan fiscal et surtout pour le travail forcé. La population a donc vécu dans la crainte de ce système.

Et c'est seulement le contact rendu nécessaire avec certaines structures comme la santé ou l'école, qui a fait naître le besoin d'y avoir recours pour disposer d'un acte d'état civil.

Les Etats devenus indépendants n'ont pas fait par la suite de sensibilisation auprès des populations, sur l'intérêt d'user de ce système.

Car en ce qui concerne l"Etat, en Afrique de l'ouest le service de l'état civil a été tardivement introduit par l'autorité coloniale, d'abord au bénéfice des ressortissants européens résidant dans les villes et seulement plus tard pour les populations locales, à partir de deux arrêtés de 1933 et 1950 portant son extension aux citoyens de statut coutumier.

A l'indépendance les nouvelles autorités étatiques, ont nationalisé les réglementations coloniales, qui ont partiellement évoluées par la suite (1972 par exemple pour le Sénégal avec le Code de la Famille); d'où le constat d'une législation sur l'état civil pratiquement inadaptée aux besoins actuels.

Et ainsi indépendamment de l'existence de certaines règles à ce titre, les règles coutumières continueront de s'imposer dans la vie quotidienne pour régir les mariages, la filiation...Et cette situation perdure encore.

Les nouvelles autorités n'ont en effet pas perçu très vite l'importance et la valeur des données émanant de l'état civil pour les besoins de gestion administrative.

Le constat est que l'outil souffre d'un problème d'organisation et d'infrastructure; ensuite les lois et procédures d'enregistrement des faits relatifs sont inadaptées tout cela produisant de sérieux problèmes structurels.

Or l'état civil est un outil de gestion, de planification, un justificatif des états juridiques de la personne, une mémoire d'évolution. Il assure donc une fonction administrative (permettant aux organismes d'assumer leurs tâches), statistique, et une fonction juridique (preuve par documents fournis des états des personnes).

L'état civil est ainsi un système d'information constituant la base d'une administration publique moderne. Il permet à l'administration d'individualiser ses citoyens et aux individus de prouver leur identité et situation juridique.

Les premiers bénéficiaires sont donc les citoyens et l'ensemble de l'appareil d'Etat, à savoir les services d'administration publique, de santé, d'éducation, le système judiciaire, le service statistique national, les organismes de défense des droits.

Les registres des naissances, des décès, des mariages,des divorces, ... sont autant de pièces justificatives officielles dont les cityens ont besoin pour attester les faits, les dates, les circonstances, relatifs à leur état juridique; rensignements indispensables pour les services juridiques et administratifs d'un pays.

En l'absence de tels justificatifs, les droits et les privilèges des citoyens, consacrés par la constitution et les instruments internationnaux, seront sans effet, ce qui faciliterait les injustices et l'exploitation en particulier à l'encotre des groupes défavorisés particuliérement les femmes et les enfants.

Il incombe donc à l'Etat, le devoir de la promotion de l'usage et de la sauvegarde de cet outil et sa défaillance à ce titre appelle une solution urgente. 

Comprenant cela l'ONU par le biais de ses agences a depuis 1990 lancé un programme pour aider les Etats à améliorer et accélérer l'enregistrement des faits d'état civil, cela par par un appui technique et des formations. L'Union Africaine au plan régional en a fait également une préoccupation d'action.

Il urge toutefois pour les citoyens de voir les effets de toutes ces interventions, car cette carence de l'Etat, produit encore la privation d'usage de leurs droits à notamment bien des enfants. Pour l'exemple sur ce plan, des enfants en âge d'irresponsabilité pénale (moins de 13) se retrouvent en prison (dans des conditions inhumaines en bien des pays africains), faute d'avoir pu justifier de cet âge par un acte d'état civil, ou d'autres encore pour le même motif, sont considérés comme majeurs et privés des droits de la minorité, exclus du privilège de juridiction ensuite jugés comme des adultes. Et les enfants concernés par ce type de traitement font légion, ce qui est tristement regrettable.

Pour lutter contre ces dysfonctionnements nous avons du proposer des mesures palliatives qui ne sont cependant pas la solution adéquate; d'où un appel à une prise de conscience de cette situation qui est une question urgente.

La solution perenne passe par une sensibilisation et responsabilisation des familles d'une part et d'autre une organisation modernisée du service. 

Le défi de la formation des acteurs...

Panoramique[1] sur les formations en Droits de l’Enfant en Afrique Francophone[2]

La mise en pratique des principes émanant de la CIDE rend nécessaire une maitrise  de ses concepts et une pratique professionnelle conforme aux normes édictés.

A cet effet, la formation des intervenants devient une activité nécessaire et incontournable, qui cependant n’a pas aussitôt  été résolument pris compte par les états en Afrique francophone.

En effet  l’observation dans ces dernières décennies, de l’évolution des activités de formations en droits de l’enfant, destinées aux acteurs, permet de relever les constats suivants ; il est ainsi notable de la part des états de la région d’Afrique susvisée :

  • Une première étape[3] post ratification, qui sera caractérisée par la faible implication des états dans la mise en œuvre des formations : en effet juste après les ratifications de la CIDE, les états sont faiblement intervenus comme organisateur ou responsables de la formation des personnels en charge de son application. L’explication de ce fait a été que postérieurement aux ratifications, le travail d’harmonisation du cadre légal avec les principes consacrés par la CIDE, n’était soit  pas encore  entamée ou achevé. Et au sein des états, les autorités ne se sentaient  pas encore  le devoir de rendre très vite conforme l’action des acteurs, avec ces principes édictés. Car surtout en ce moment-là, au-delà des acteurs vivant les contraintes du terrain, les autorités décisionnelles  étaient-elles peu imprégnées des principes nouveaux consacrés par la CIDE. Voilà pourquoi dans cette période, les formations intervenues seront réalisées sous  l’initiative des ONGS[4], organismes des NU, ou organisations de la société civile avec l’aval des états. Ces intervenants ont formuleront et justifieront leur demande de formation des acteurs, au vu de la situation des enfants sur le terrain dont la prise en charge était non conforme aux exigences des droits consacrés par la CIDE.

  • Une deuxième étape[5] va survenir, et est ensuite marquée par l’aval continu par les états, du processus entamé de formation, mais sans politique de suivi de leur part : En effet c’est la situation souvent catastrophique de la prise en charge des enfants sur les terrains d’action, qui va justifier les besoins de formation relevés et les formats proposés. Et il fût urgent d’intervenir pour réformer ces situations difficiles. Donc l’accent sera orienté sur une mise en capacités des acteurs, pour produire en eux une dynamique d’intervention susceptible d’améliorer la prise en charge des enfants. A ce titre les ateliers prendront  des formats multifonctionnels, pour toucher le maximum d’acteurs et surtout les regrouper pour rompre le cloisonnement, ainsi asseoir l’idée d’une action multidisciplinaire. Dans plusieurs pays ces types de formations organisées à un rythme soutenu, ont précédé les réformes des cadres légaux et les ont particulièrement suscités. Et l’autre  grand effet en résultant, a été celui ayant permis aux acteurs de savoir améliorer la prise en charge en usant même de palliatifs comme mesures, même face au silence de la loi. Toutefois ce processus a été limité ensuite par la mobilité du personnel souvent affecté à d’autres emplois ; ce qui atteste que les états n’ont pas pris en compte les capacités nouvelles créées par ces formations. Il s’en suivra généralement une perte des ressources humaines capacités, ainsi employées dans des domaines sans lien  les formations reçues. Cet aspect dénote aussi de la part des états une absence de politique concertée et suivie dans la mise en application de la CIDE. C’est pourquoi cette étape s’est fortement  conclue  par un fort plaidoyer d’une part pour la réforme du cadre légal de prise en charge du mineur et sa mise en conformité avec les principes de la CIDE, d’autre part pour un plus grand engagement des états. Beaucoup d’états[6] franchiront dès lors ce cap ouvrant une nouvelle évolution dans la mise en application de la CIDE.

  • Une troisième étape actuelle est en cours, assurant la  prise en compte de la formation, par les états au regard de la nécessité de construction d’un système de justice juvénile : Les réformes  intervenues dans les cadres légaux, et  l’évaluation des difficultés sur les étapes précédentes, ont entrainé la nécessaire prise en compte des besoins de formation et l’implication désormais sur ce plan des administrations étatiques. Une nouvelle dynamique va ainsi naître, exigeant de travailler à la mise en place d’un système de justice juvénile, et rendant nécessaire la capacitation des acteurs chargé de son fonctionnement. A ce titre deux  voies de formation s’offraient en appui : le format multifonctionnel[7]  au profit de l’ensemble des acteurs pour une rapide mise à niveau et une urgente opérationnalisation, et celle de l’intégration de curricula de formation en droits de l’enfant dans les écoles ou instituts de formation du personnel. Mais cette deuxième voie est encore très embryonnaire dans les états. Elle reste utile à devoir être consolidée,  et particulièrement comme parade au handicap qui a toujours été la mobilité du personnel formé. Toutefois il est à faire remarquer que l’usage simultané  des deux voies de formations précitées n’est antinomique l’une à l’autre, et même doit être combinée. En effet l’intégration des formations dans les écoles assure le renforcement des capacités et compétences des acteurs dans leur corps de métiers, mais sans lien avec les autres acteurs. Or cela est un obstacle  à une action de terrain  dans la prise en charge du mineur, qui doit être nécessairement être marquée par le sceau  qualitatif de la multidisciplinarité. Alors que la formation  par la voie multifonctionnelle[8] rompt le cloisonnement fonctionnel dans la prise en charge du mineur, permettant aux différents acteurs d’échanger sur leurs difficultés pratiques, pour ensuite imaginer  ensemble des solutions  face aux multiples défis de la prise en charge.

    C’est donc à ce niveau que situe dans les pays, la gestion de ce besoin général de formation au bénéfice des acteurs, et tous  les états ne sont pas au même niveau de réactivité dans sa prise en charge.

 

Quels défis dès lors pour l’avenir sur cette question  de la formation des acteurs :

  1. L’urgence tient encore à un plaidoyer pour une plus grande implication des états  dans  ce domaine. Mais pour cela agir en collaboration avec les précédents intervenants[9] sur ce domaine, car leur  expérience accumulée en accompagnement est une garantie de non répétition et d’efficience dans le choix des problématiques et thématiques de formation.

  2. L’objectif au regard de cette évolution retracée, est aussi de savoir définir une juste et correcte  détermination, de la  caractéristique des besoins de formation des acteurs.

En effet face aux impératifs de la prise en charge des mineurs, les besoins actuels des acteurs du  terrain sont particulièrement des outils de maîtrise de l’intervention  à savoir:

  • Outils explicatifs pour la compréhension des notions émanant des principes ;

  • Outils de mise en œuvre des processus d’intervention ou des protocoles d’action.

En effet l’essentiel du besoin, tient d’abord  à la connaissance du « comment faire ? tel ou tel chose… ». Et il faut aller à l’essentiel de manière claire et pratique.

  1. Sur un plan plus théorique la réflexion sur le sens et contenu des  principes nouveaux  posés par la CIDE ; qui  est encore très sommaire, doit être amorcée et développée. Car peu de spécialistes se consacrent  à ces questions, alors que sur d’autres aires géographiques toute une littérature académique se développe sur ces nouveaux concepts.

Il s’agit là de nouveaux chantiers  à ouvrir, car une telle réflexion doit pouvoir faciliter l’implémentation des principes dans la recherche des voies de leur incorporation à la tradition ambiante pour une appropriation plus généralisée de la CIDE par le plus grand nombre. Il faut ouvrir un vrai chantier de contextualisation des principes, au vu des moyens limités des pays. Les états peuvent y jouer un rôle de facilitation.

  1. L’évolution relatée dans cette note,  a déterminé et relevé la limite majeure qui a été l’absence d’une réelle politique de prise en charge de l’implémentation de la CIDE[10] .Et  la formation des acteurs en est un volet essentiel. Cette construction de cette vision politique est urgente, mais doit s’installer dans une concertation avec les intervenants notamment ceux ayant joué un rôle pionnier.

Fait à Dakar ce 31 octobre 2013

Par Me François M. Diassi



[1] Le choix de ce terme est justifié par le fait qu’il a été difficile d’inscrire les réflexions de cette note  dans étapes temporelles bien déterminées, cela parce l’évolution diffère selon les pays concernés, et des rythmes propres à chaque ; il ne s’est pas agi d’une évolution  linéaire, c’est un regard circulaire d’observation  qui a permis de noter les points saillants.

[2] Les pays sujets à cette observation vont de la Mauritanie, au Golfe de Guinée, mais les plus directement concernés sont : le  Sénégal, le Mali, la Guinée Conakry, le Bénin, la Cote d’Ivoire, le Burkina Faso, le Niger…

[3] Cette étape peut être temporellement fixée en 1990 et 2000.

[4] Terre des hommes à ce titre s’est beaucoup impliquée, en Guinée Conakry, en Mauritanie et même hors le contexte ouest africain au Burundi

[5] Temporellement cette étape vise 2000 à 2010

[6] C’est le cas de la Mauritanie, du Mali, de la Guinée, du Bénin…qui ont  réformé leur Code de Procédure Pénale, pour la prise en charge des mineurs, d’autres états ont simplement institué de  nouveaux organes judiciaires à ce titre Le Sénégal quant à lui a une position spéciale pour avoir intégré le dispositif de prise provenant de la loi française de 1945, bien avant l’adoption même de la CIDE .

[7] Ce format devient d’ailleurs l’outil le plus usité pour  ces formations parce qu’ayant démontré son utilité..

[8] Au vu de l’apport de ce format  de formation il serait  très hasardeux  de décider leur extinction, au risque  pour les acteurs  perdre cet espace de remise en question, de remobilisation et de construction de synergie  d’intervention.

[9] Des ONGs comme Terre des hommes ont développé un capital expérience en ce domaine utile  à ne pas méconnaitre, par les nouveaux intervenants.

[10] Voir les développements sur ce plan contenus dans notre précédente  note relative à l’implémentation de la CIDE.

La douloureuse situation d'inadaptation des prisons en Afrique, l'état de prise en charge déplorable des enfants dans ces lieux...d''ou la nécessité d''une politique pénale adaptée aux exigences de la CIDE.

Les prisons en Afrique

L’état des prisons en Afrique est dans une situation d’obsolescence très avancée, découlant d’infrastructures inadaptées et vétustes, de personnel en sous formation, ainsi que d’un modèle ou format de prise en charge plus répressif et sécuritaire que réhabilitatrice, enfin souffrant d’une surpopulation résultant de la vocation rétributrice du système pénal.

Ces caractéristiques enlèvent toute efficience à l’outil, plus enclin désormais  à faciliter l’émergence de récidivistes, de criminels endurcis, contribuant ainsi à augmenter son facteur risque social et lui permettant de faillir ainsi de plus en plus à l’atteinte de l’objectif de protection sécuritaire et social attendu de son fonctionnement ; tout cela encore exacerbé par son état fortement budgétivore en faveur d’une population improductive.

Toute cette situation et ces effets devraient pousser les états africains à réfléchir en efficience, et opter pour des politiques pénales favorisant la réhabilitation plutôt que la  simple répression.

Pour les enfants en particulier ce choix est encore plus impérieux.

En effet leur faiblesse et vulnérabilité exige une prise en charge particulière, de plus nécessitée par les dispositions de la CIDE. En conséquence des choix plus accentuées d’alternatives à l’incarcération et à la mise  en place d’une justice pénale restauratrice, sont des voies idoines vers cette prise en charge plus adaptée aux enfants.

Cette option implique pour les états africains de devoir reformer leur cadre légal en y faisant ressortir ces choix politiques et stratégiques dans ses principes de fonctionnement, ensuite de former les acteurs à l’admission de la mise en œuvre de ces principes dans leurs décisions et actions, enfin de sensibiliser et mobiliser les communautés et populations en leur adhésion aux nouvelles exigences et règles.

C’est un long travail nécessaire à promouvoir et réaliser au bénéfice d’un fonctionnement apaisé par une maitrise conséquente du fait délictueux et infractionnel, puisque les acteurs seront plus présents, plus réactifs et travailleront en synergie et en inclusion, plutôt que de manière parcellaire et compartimentée.

Le système pénal fonctionnera avec moins de pression et d’attention individuelle sur les cas personnels étant plus accentué à favoriser une prise en charge plus adaptée à chaque bénéficiaire.

Les acteurs plus formés fairont des choix méthodologiques et pratiques plus en efficience produisant des résultats mieux conformes aux besoins des cibles accompagnées.

Le résultat social sera de loin plus bénéfique et efficient, que le choix de l’option actuelle du tout carcéral, gouffre économique doublée d’une inadaptation culturelle, produisant défiance et vécu compartimentée des populations évoluant dans un pluralisme de systèmes ne favorisant pas l’unité et le progrès devant naître d’une convergence de vision et d’action.

 

LA FAIBLE UTILISATION DES ALTERNATIVES A L'INCARCERATION

Généralités introductives sur les justifications pour l’usage des alternatives

Il nous est possible de trouver des justifications juridiques économiques sociales et culturelles à la nécessité d’user des alternatives à la détention.

D’un point de vue économique la gestion de l’emprisonnement est coût énorme pour le budget de nos états qui sont alors contraints d’affecter de si importantes ressources à une population carcérale improductive.

Or vu la rareté des ressources aujourd’hui nos états en développement ont grand intérêt de pouvoir user de toute formule du point de vue de l’efficience alléger les coûts de gestion.

D’un point de vue social la prison n’a pas garantit la société comme moyen  assurant le reclassement social et la réintégration réussie, mais par  contre les récidives et la contamination criminelle sont des risques très courant résultant de son fonctionnement.

D’un point de vue culturel la prison dans nos états est un pur produit de l’état moderne post colonial, qui n’était pas la forme la plus adaptée pour asseoir les moyens de l’amendement ; d’où la nécessité de réfléchir aux moyens et conditions de cet adaptation.

 

INTRODUCTION A l’étude  DES  MESURES ALTERNATIVES A LA PRIVATION DE LIBERTE EN JUSTICE JUVENILE

 

Le principe étant d’éviter autant que possible la détention. Mais pourquoi ?

 

La Justice pénale pour mineurs recherche un équilibre difficile entre le souci de devoir sanctionner le fait répréhensible commis par l’enfant, tout en lui offrant les moyens d’une réhabilitation, propre à empêcher de sa part tout comportement déviant plus tard.

Le juge pour enfant, au moment donc de décider sur le cas soumis à son examen, porte l’énorme responsabilité de ne devoir appliquer à l’enfant en cause, une sanction qui entraîne sa « chute » irrémédiable dans la délinquance.

C’est d’ailleurs pourquoi, tout l’art du travailleur social est alors de lui livrer un portrait des plus complets de la personnalité de l’enfant et de l’environnement qui l’a vu grandir.

Ce n’est que nanti de tous ces repères, que le juge serait à même de se prononcer.

Certes à ce moment la gravité du fait commis et dont il est question de juger, peut avoir l’influence de peser fortement sur le choix de la sanction à prononcer, mais l’équilibre à rechercher pour l’enfant est moins de penser au poids du fait commis, que de lui donner à l’avenir toutes les chances de s’amender.

C’est donc pour favoriser cette vision, que dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l’enfant, il est préconisé, que la sanction pénale privative de liberté ne soit prise qu’en dernier ressort.

Cela s’explique en partant du principe que d’une part le but de la sanction doit être plus de guérir que de punir, de reclasser socialement le mineur; d’autre part que la prison offre le moins possible, en tant que cadre, tous les moyens d’une resocialisation future de l’enfant.

Et en plus du risque de contamination criminelle qu’il génère la prison coûte chère à la nation parce que contribuant à la prise en charge d’une population improductive

Voila donc pourquoi, relativement aux sanctions applicables aux faits pénalement répréhensibles commis par l’enfant, les recommandations restent fortes de recourir aux mesures alternatives à la privation de liberté.

 

Mais d’abord quelles sont ces mesures ?

Il n’y a pas un catalogue uniforme, et ces mesures peuvent différer suivant les législations nationales.

Toutefois, il faut retenir qu’il s’agira de toute décision qui n’aura pas pour effet, de contraindre l’enfant à subir en un lieu déterminé, une privation de liberté, d’aller et de venir et d’être avec ses parents.

Moment d’application de ces mesures :

Elles doivent pouvoir intervenir avant le jugement de la cause, ou être décidées par le jugement.

Il faut noter qu’avant le jugement, dans la période préparatoire, depuis le déferrement du mineur au Parquet, jusqu’à l’intervention proprement dite du juge des enfants (Tribunal), il y a le réflexe très habituel de placer le mineur en détention préventive ou sous ordonnance de garde provisoire entre les mains du Régisseur.

Or, c’est dans cette période, suivant la commission des faits, que l’enfant est le plus fragile, manifestant le plus grand besoin d’un encadrement psychoaffectif pour sa stabilisation.

L’option d’une privation de liberté ne compliquera que davantage sa situation, hypothéquant mêmes les chances de réhabilitation rapide.

C’est pourquoi, c’est à ce moment qu’il reste plus que jamais nécessaire d’appliquer ces mesures ; avec une insistance pour l’accompagnement par un travailleur social.

Au moment du jugement, le juge pour enfant disposant de plus d’éléments d’appréciation devrait être à même, avec le soutien du travailleur social, de déterminer la mesure la plus appropriée.

Le caractère révisable de la décision du juge des enfants :

C’est une caractéristique fondamentale de la justice pénale applicable à l’enfant, que les mesures décidées à son sujet, sont toujours révisables dans le sens de son plus grand intérêt. Elles ne sont pas définitives.

C’est pourquoi, il  doit rester toujours possible au juge des enfants même après une décision privative de liberté de pouvoir réviser cette décision, pour une mesure non privative de liberté.

Généralement, cette décision intervient après le rapport du travailleur social, déterminant des signes favorables d’amendement manifestés par l’enfant.

C’est là une voie à développer.

La visée UTILE de construction d'un modèle de JUSTICE JUVENILE RESTAURATRICE

Il est en effet de plus en plus recherché et proposé comme objectif d’action, de faire de la justice juvénile une justice restauratrice, ce pour privilégier des solutions, visant l’accord entre l’auteur de l’infraction et la victime et contribuant à une réhabilitation sociale de l’auteur, par une réparation responsable de sa part du trouble et du préjudice causé.

En parvenant à un tel objectif, une nouvelle image sociale se crée faisant de l’action de :  

LA JUSTICE JUVENILE, CELLE D’UNE JUSTICE DE REHABILITATION

La Justice perd dès lors son caractère et sa visée première de rétribution, pour un nouvel habit de recherche de consensus, car n’étant plus fondée sur la seule contrainte. Voila à titre comparatif donc, décrit  ci-dessous :

CE QUE DEVIENT LA JUSTICE JUVENILE SELON QU’ELLE EST IMPOSEE OU NEGOCIEE

 

IMPOSEE

Donc RETRIBUTIVE

NEGOCIEE

Donc REHABILITATRICE (RESTAURATRICE)

Alors elle recherche

La sanction DE LA VIOLATION DE LA LOI

Elle parvient à mettre en rapport des PERSONNES à créer DES RELATIONS

Elle vise la reconnaissance de la CULPABILITE

Elle fait admettre la RESPONSABILITE

Elle réalise la PUNITION

Elle vise la REPARATION

Elle est surtout ORIENTEE VERS LE PASSE

Elle a une VISION VERS LE FUTUR

Elle fait ressentir QUE LA PUNITION AJOUTE LE MAL AU MAL

Elle fait accepter que la réparation aboutisse à la COMPENSATION POUR LE MAL FAIT

Elle veut que l’AUTEUR SOIT DENONCE

Elle dénonce L’ACTE et non l'auteur

Elle aboutit à ce que LA JUSTICE DIVISE

Elle a pour conséquence que la JUSTICE REUNIT

Elle aboutit à ce que les BESOINS DE LA VICTIME SOIT NEGLIGES

Elle prend en compte LES BESOINS DE LA VICTIME

Elle aboutit à ce que le procès SEPARE LES PARTIES

Elle obtient que la JUSTICE RECONCILIE LES PARTIES

Elle vise à ce que LE MAL CAUSE PAR L’AUTEUR SOIT COMPENSE PAR LA PUNITION

Elle aboutit à ce que le fait délictueux soit COMPENSE PAR L’ACTE POSITIF de l’auteur du fait.

Pour cette JUSTICE L’ETAT A LE MONOPOLE de régler LE CONFLIT

Cette JUSTICE PROMEUT la reconnaissance du ROLE DE L’AUTEUR DE LA VICTIME ET DE LA COMMUNAUTE

Et il est possible d’arriver à la réalisation de ces objectifs, pour la justice applicable aux mineurs, vu l’exigence de spécificité qu’elle requiert, cela pour asseoir la spécialité requise d’elle-même par la CDE, et aussi toutes les règles et principes internationaux dont l’application est nécessaire, pour une bonne justice rendue pour les mineurs.

Normes juridiques internationales relatives à la protection spéciale des enfants en vulnérabilité

La nécessaire Protection Spéciale de l'Enfant plus particulièrement dans notre contexte africain, voir cette revue des instruments juridiques à cet effet réalisée par Me Diassi

LA NECESSAIRE CONTEXTUALISATION DE LA CIDE PAR LA PRISE EN COMPTE DE L'APPROCHE CULTURELLE